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appart en Chine
16 octobre 2006

Shanghai

shqnghqiLa rue faisait 15 mètres de large pour 300 mètres de long ; dans le rétroviseur du taxi qui m’amenait à l’aéroport, elle avait l’air d’un terrain vaguement goudronné.
A mon retour, 8 mois plus tard, elle déroule crânement un tapis d’asphalte luisant ; escorté par des lampadaires « Belle Epoque », elle fait l’avenue jusqu’au carrefour, au-dessous de la rame du métro aérien.
Les maisons de moins de deux étages ont été rasées. De nouveaux buildings se remplissent et une douzaine d’autres sont sur le point d’émerger de leur gaine de bambou.
Mon immeuble, jaune délavé, cadrait bien avec mes années septante ; L’on me dit qu’il a été construit dans les années quatre-vingt dix.
Les façades sont maintenant rose saumon. Les toits qui étaient plats sont recouverts de fausses tuiles grenat, des moulures en plâtre frais dégoulinent jusqu’au rez-de-chaussée, jusqu’à la petite plaque métallique qui prévient que l’hygiène est du ressort de chacun.

Mon xiaoqu est composé de trois rangées d’immeubles de six étages. Tous les appartements ont un balcon donnant sur le Sud et les cuisines regardent toutes au Nord. Au pied des blocs, de petits jardins avec des arbres, des fleurs rouges, quelques légumes, des poules et des vieilles qui font des exercices de Tai Qi ; leurs larges abdomens décrivent des gestes sûres et flasques.
Il y a des xiaoqu de tous les styles et de toutes les grandeurs, ils ont tous un mur d’enceinte, une seule entrée et un gardien plus ou moins canin ; chez moi la petite guérite abrite un commerce de location de DVD, c’est le premier d’une demi-douzaine de petits commerces qui longent l’allée principale. Devant  l’épicerie, des vieux, assis sur leurs petites chaises en bambou, passent la journée à détailler les allées et venues. Souvent ils m’abordent : «T’as mangé ou pas ? Viens t’asseoir, il ne faut pas t’inquiéter, t’en trouveras du travail ! »
A côté de nous, une matrone vend des bols de nouilles ; quelques ouvriers mangent, le dos courbé, les yeux au bout des baguettes.
Un avion à réaction strie le ciel bleu, la lessive flotte sur les cadres rouillés, arrimés aux façades sud. Deux ou trois bicyclettes sillonnent les allées. Une voiture klaxonne, trois femmes d’âge différent veillent sur un petit garçon ; il se dandine vers sa mère qui revient du travail.

Je ne sors de mon xiaoqu que le soir, pour aller chercher Lanlan à la sortie de son travail. Au début de la ligne du bus, je m’affale sur l’un des trente sièges, une rangée derrière le chauffeur et de l’autre côté des doubles sièges où je ne m’assois jamais
Ecouteurs sur les oreilles, une bière dans la main et le regard perdu de l’autre côté de la vitre, bien malin qui viendra me demander d’où je viens.

Sur l’avenue Huai hai, des guirlandes clignotent entre les branches de platanes dénudés, c’est là que je descends. Le trafic est encombré, bruyant ; sur les trottoirs tout le monde à l’air pressé : c’est le meilleur moyen pour avancer. Bousculades devant des boutiques pour jeune et vieux, pour fortunés et classe moyenne. Les vitrines étalent des labels globalisés et les commerces qui n’affichent pas d’affiliation occidentale ont des crieurs pour appâter le chaland. Quelques mendiants hargneux. Mac Donald, etc.
Dans l’avenue vaporisée de gaz Néon, je marche en suivant les pavés au relief travaillé pour les non-voyants. Mon train aveugle m’amène jusqu’au restaurant français où travaille Lanlan, ça tombe bien.
Son patron me fait boire jusqu’à ce qu’elle puisse enfin poser son tablier.

Sur le chemin du retour, l’avenue s’est vidée, ne restent que quelques mendiants noctambules et les flaques noires que lèchent les enseignes lumineuses.
En attendant le bus je fume une cigarette devant une échoppe qui vend des saucisses et du lait parfumé de toutes les couleurs.
Lanlan me tend une saucisse rose, traversée dans la longueur par une baguette en bois, un goût de chair sucré

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