Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
appart en Chine
10 avril 2012

10-11-12

Le minibus de luxe file sur les ponts de l’autoroute qui traverse les montagnes de l’ouest de notre province, le Hubei. Temps maussade, début d’automne. Hier nous étions au barrage de trois gorges et ce soir nous arriverons dans la ville d’Enshi, coincée entre les montagnes, elle protège jalousement sa partie de culture Tu Jia, l’une des 56 ethnies de Chine selon le gouvernement. Assise à côté de moi, ma femme, derrière nous un enfant indiscipliné par son père grande gueule, le mari de l’une de mes collègues. Les autres sont aussi là, le département de français en sortie de boîte. Par-dessus l’épaule de ma femme, il y a mon patron, quelques conversations avec lui. 2011, année des petits voyages. En février, nous avions fui, ou plutôt j’avais enlevé ma femme vers le bord de mer, au sud, dans la province du Guangxi, loin de la famille qui passe les deux semaines de la fête du printemps dans un appartement sombre, humide et froid, à Chibi où les journées passent en alternant télé brasero, repas brasero et majong brasero, à la maison avec des invités ou chez des invités qui nous ouvrent la porte pour que nous puissions poser les cadeaux avant d’offrir les enveloppes rouges aux enfants ou au futur mariés ou aux nouveaux étudiants, etc. Ces cadeaux font partie des fêtes ; l’on donne et l’on reçoit. Exemple : ma femme offre 100 yuans à son neveu dont les parents quand ils viendront chez nous, offrirons une cartouche de cigarettes à 100 yuans, bon ils ont deux enfants alors il y a une enveloppe rouge en plus et avec les cigarettes une bouteille de vin. Nous n’avions pas fui les cadeaux à offrir mais le mauvais temps et puis les journées cuisine, le ménage pour elle et l’ennui pour moi. Lors de ces vacances volées elle m’a quelques fois fait payer la déception de ses enfants et de sa petite fille du côté de la plaine de Chibi, là où a eu lieu la bataille. Cependant les fruits de mer, les papayes, le dépaysement ont réussi à ensommeiller sa fibre maternelle. Notre premier voyage pour amoureux, mon premier voyage touristique chinois ! Je suis revenu en pleine forme au Hubei et le semestre c’est bien passé, j’ai renouvelé mon contrat et le semestre d’été commença avec ce voyage en minibus en compagnie des autres profs. Depuis 3 ans dans la boîte, c’est la première fois que l’on m’invite à ce genre d’activité entre collègues et qui plus est avec Rouge. Elle ne voulait pas venir, il a fallut la convaincre « s’ils t’ont invitée c’est parce qu’ils ont envie de te voir, si tu ne viens pas, tu nous fais perdre la face » et elle « mais je n’ai rien à faire avec des profs, je ne suis pas assez cultivée, etc. » La discussion a duré jusqu’au matin du départ et nous sommes arrivés en retard, presque les dernier au rendez-vous, 5 minutes avant la famille avec le gamin. Ce voyage représente pour moi un très beau souvenir, les paysages et le plaisir, la découverte des Tu Jia et la satisfaction d’être avec des collègues que je ne vois pour ainsi dire pas pendant les périodes de cours. Et puis je suis gentiment sorti de la cachette chaude que m’offre le siège à côté de Rouge pour discuter avec mon doyen. Il a apprécié mon plan de cours d’introduction à l’anthropologie et j’ai pu profiter de ses conseils. La nouvelle année académique commençait bien. Je pouvais profiter des expériences de l’année précédente et de ma préparation estivale (lecture d’Herskovitz) et aussi de l’absence des classes de premières dont le premier mois universitaire est consacré aux exercices paramilitaires. En ce début de semestre j’avais encore un ou deux jours sans cours par semaine et j’ai pu préparer au dernier moment un cours imprévu sur l’histoire de la Suisse au sein de l’Europe. J’ai travaillé sur les Celtes, les Helvètes, Tell, les Habsbourg (harcelés par les cantons primitifs !) et parallèlement : les Gaules, César, les Germains jusqu’à Charlemagne et le début du Saint Empire Germanique. Rome et la christianisation de l’Europe occupèrent ma semaine de vacances en automne et je ne pus comme désiré monter à Pékin pour rencontrer le professeur Billeter. Suite à la demande de mon département de contacter des professeurs suisses pour les inviter j’avais pensé au professeur Jean François Billeter pour son travail sur le Zhuang Zi et la possibilité d’une discussion sur les différentes possibilités d’approche des textes de se philosophe. Cette perspective ne semblait pas vraiment séduisante à mes dirigeants mais ils ont montré beaucoup d’intérêt pour le travail d’interprète du professeur genevois pendant la visite de l’ancien président chinois en Chine, Jiang Zemin. J’ai donc commencé à écrire à ce professeur dont j’avais pu suivre quelques cours avant sa retraite académique. Pas assez pour qu’il remette un visage sur la personne qui l’invitait à venir faire une intervention à l’Université de Wuhan mais dans ses lettres conviviales et ouvertes il imaginait la possibilité d’une visite en février 2011, malheureusement il s’est cassé un bras et a dû reporter son voyage en Chine à l’automne sans trouver de temps pour « une causerie » avec les étudiants de notre Université. Je crois néanmoins que cette correspondance aura été bénéfique pour notre département. Au début je ne connaissais pas l’importance accordé à la pensée de François Julien par le doyen de notre département. Je ne sais, compte tenu de la polémique Julien / Billeter s’il n’avait pris ma proposition d’inviter le professeur genevois pour de la provocation. Cette controverse, je n’en étais pour ainsi dire pas au courant, cela faisait bien longtemps que je n’avais pas lu d’articles de sinologie. Mon intérêt se portait sur le Zhuang Zi de Billeter. J’ai prêté ce livre à notre doyen et je crois qu’il se trouvera dans la bibliographie d’une doctorante faisant un travail sur Julien. Ainsi, l’éventualité d’une visite de Billeter a permis de le faire connaître dans notre département et sans doute de prendre des distances face à une position trop pro-Julien. De plus la presque réussite de la visite d’un professeur de plus en plus apprécié dans notre département a sans doute influencé sur ma deuxième mission, qui était de contacter les professeurs Zufferey et Borgeaud. A ce moment-là c’est déjà l’avalanche de classes. Après les vacances d’automne passées sur le balcon à potasser le christianisme entre Jérusalem et la Rome de Constantin, je n’ai plus eu de jour sans cours. Quand on aime on ne compte pas. Je participe encore à des conférences et prépare deux interventions, l’une dans le cadre d’une rencontre entre professeurs de français de toute la Chine et l’autre pour un lieu touristique, Chibi, où se serait déroulée une bataille célèbre du roman Les trois royaumes. Chibi, cette ville, à 200 kilomètres au sud du Wuhan, mes amis la connaissent bien puisque c’est de là que vient me femme et c’est là que nous avons acheté l’appartement sombre et froid où elle se les gèle, fait la cuisine et le ménage pour les enfants alors que moi je suis de retour à Wuhan pour écrire ce texte et préparer les classes de 2012 qui commencent dans une semaine. Aujourd’hui c’est YuanXiao jie, la fête qui clôture les festivités de la fête du printemps. Je la passe seul avec l’air conditionné, les chats, l’écran et quelques errements paresseux pour retrouver des forces et pouvoir affronter dans les meilleures conditions possibles le prochain semestre où nous espérons la visite du professeur Borgeaud pour un séminaire sur l’histoire des religions. Notre vice-doyen l’a rencontré à Genève et grâce au professeur Zufferey et au centre Confucius de Genève, la visite de mon professeur est du domaine du possible. Ce texte aurait dû se finir en février et c’est déjà mi-avril. Ma femme est de nouveau à Chibi. C’était la fête de Qing Ming, dédiée aux visites des tombes. Je n’ai pu aller me recueillir sur la tombe de son père, manque de temps. Sa tombe est à la campagne, là où Rouge est née, pas loin de la ville de Chibi. Un hameau au milieu d’une plaine de rizières. Il n’y reste plus beaucoup de maisons traditionnelles, toit de chaume et briques rouges, mais le rythme de vie n’a pas dû beaucoup changé. La mère habite dans la maison du frère, un bâtiment de deux étages en béton sans aucun charme, peu importe. J’adore cet endroit pour la nature tout autour, la rivière, les étangs, les buffles, les orangers et les enfants qui se jettent dans mes bras avec des rires plein de gaité. J’y passe la plupart du temps assis dans la cour avec un livre que je lis à peine. Retour à la réalité, je finis ce texte dans un appartement dont l’aménagement est à peine terminé. Nous avons dû quitter celui avec le grand balcon où j’étudiais l’histoire l’année passée et un coup du sort a voulu que dûmes déménager deux fois au mois de mars. Celui-ci est pas mal, je crois que je vais m’y sentir bien et quand la semaine passée j’ai perdu les donnés de deux des disques durs de mon ordinateurs, je ne me suis même pas énervé. Le vice-doyen attend des nouvelles de l’Université de Genève, le fils de Rouge devrait se marier et il faudra penser à acheter une voiture, j’essaie de diriger une courte adaptation théâtrale du roman du Rêve dans le pavillon rouge et la chatte va bientôt ravoir des petits.

Publicité
Publicité
Commentaires
M
Lorsque,il y a quelques temps,tu as abandonné tes 2 blogs je me suis senti coupable, coupable d'avoir été cette vieille mégère acariatre qui polluait tes posts... après ma souri est morte mais j'ai conservé mes anciennes adresses...en revenant j'ai constaté que même Leaticia te retrouvait enfin et ma peine de t'avoir alourdie la vie m'a été un peu moindre... j'ai repris espoir d'un internet satisfaisant et te souhaites le meilleur pour toi et les tiens...
L
Je reviens un peu par hasard sur ton blog... ça me fait plaisir d'avoir un texte à y lire... je vois les différents endroits que tu y décris... bien que je ne les ai pas tous connu...<br /> <br /> à bientôt<br /> <br /> bises à rouge et à ton fils...
Publicité